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vaisseau, ceux qui ont fourni les agrêts, les appareaux, les vivres, sont aussi ceux qui prennent le principal intérêt à cette pêche. Perdissent-ils sur la pêche, ils ont gagné sur les fournitures. Ce commerce est une espece de loterie, & chacun est séduit par l’espérance d’un billet noir. Tout le monde aime à jouer ; & les gens les plus sages jouent volontiers, lorsqu’ils ne voient point les apparences du jeu, ses égaremens, ses violences, ses dissipations, la perte du temps, & même de toute la vie.


CHAPITRE VII.

Esprit de l’Angleterre sur le commerce.


L’ANGLETERRE n’a gueres de tarif réglé avec les autres nations ; son tarif change, pour ainsi dire, à chaque parlement, par les droits particuliers qu’elle ôte, ou qu’elle impose. Elle a voulu encore conserver sur cela son indépendance. Souverainement jalouse du commerce qu’on fait chez elle, elle se lie peu par des traités, & ne dépend que de ses loix.

D’autres nations ont fait céder des intérêts du commerce à des intérêts politiques : celle-ci a toujours fait céder ses intérêts politiques aux intérêts de son commerce.

C’est le peuple du monde qui a le mieux sçu se prévaloir à la fois de ces trois grandes choses ; la religion, le commerce & la liberté.


CHAPITRE VIII.

Comment on a gêné quelquefois le commerce d’économie.


ON a fait dans certaines monarchies, des loix très-propres à abaisser les états qui font le commerce d’éco-

nomie.