Page:Montesquieu - Esprit des Lois - Tome 2.djvu/130

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ment tout ce qui porte le caractere de la sévérité. Le célibat a été plus agréable aux peuples à qui il sembloit convenir le moins, & pour lesquels il pouvoit avoir de plus fâcheuses suites. Dans les pays du midi de l’Europe, où, par la nature du climat, la loi du célibat est plus difficile à observer, elle a été retenue ; dans ceux du nord, où les passions sont moins vives, elle a été proscrite. Il y a plus : dans les pays où il y a peu d’habitans, elle a été admise ; dans ceux où il y en a beaucoup, on l’a rejettée. On sent que toutes ces réflexions ne portent que sur la trop grande extension du célibat, & non sur le célibat même.


CHAPITRE V.

Des bornes que les loix doivent mettre aux richesses du clergé.


LES familles particulieres peuvent périr : ainsi les biens n’y ont point une destination perpétuelle. Le clergé est une famille qui ne peut pas périr : les biens y sont donc attachés pour toujours, & n’en peuvent pas sortir.

Les familles particulieres peuvent s’augmenter : il faut donc que leurs biens puissent croître aussi. Le clergé est une famille qui ne doit point s’augmenter : les biens doivent donc y être bornés.

Nous avons retenu les dispositions du lévitique sur les biens du clergé, excepté celles qui regardent les bornes de ces biens : effectivement, on ignorera toujours, parmi nous, quel est le terme après lequel il n’est plus permis à une communauté religieuse d’acquérir.

Ces acquisitions sans fin paroissent aux peuples si déraisonnables, que celui qui voudroit parler pour elles seroit regardé comme imbécille.

Les loix civiles trouvent quelquefois des obstacles à changer des abus établis, parce qu’ils sont liés à des choses qu’elles doivent respecter : dans ce cas, une disposition