Page:Montesquieu - Esprit des Lois - Tome 2.djvu/299

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Ce que dit ici César, et ce que nous avons dit dans le chapitre précédent, après Tacite, est le germe de l’histoire de la première race.

Il ne faut pas être étonné que les rois aient toujours eu à chaque expédition de nouvelles armées à refaire, d’autres troupes à persuader, de nouvelles gens à engager ; qu’il ait fallu, pour acquérir beaucoup, qu’ils répandissent beaucoup ; qu’ils acquissent sans cesse, par le partage, des terres et des dépouilles, et qu’ils donnassent sans cesse ces terres et ces dépouilles ; que leur domaine grossît continuellement, et qu’il diminuât sans cesse ; qu’un père qui donnait à un de ses enfants un royaume, y joignit toujours un trésor  ; que le trésor du roi fût regardé comme nécessaire à la monarchie ; et qu’un roi ne pût, même pour la dot de sa fille, en faire part aux étrangers sans le consentement des autres rois. La monarchie avait son allure par des ressorts qu’il fallait toujours remonter.

Chapitre V.

De la conquête des Francs.


Il n’est pas vrai que les Francs, entrant dans la Gaule, aient occupé toutes les terres du pays pour en faire des fiefs. Quelques gens ont pensé ainsi, parce qu’ils ont vu sur la fin de la seconde race presque toutes les terres devenues des fiefs, des arrière-fiefs ou des dépendances de l’un ou de l’autre ; mais cela a eu des causes particulières qu’on expliquera dans la suite.