Page:Montesquieu - Esprit des Lois - Tome 2.djvu/336

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tion du roi fut plus grand que celui accordé pour la protection du comte et des autres juges.

Je vois déjà naître la justice des seigneurs. Les fiefs comprenaient de grands territoires, comme il paraît par une infinité de monuments. J’ai déjà prouvé que les rois ne levaient rien sur les terres qui étaient du partage des Francs ; encore moins pouvaient-ils se réserver des droits sur les fiefs. Ceux qui les obtinrent eurent à cet égard la jouissance la plus étendue ; ils en tirèrent tous les fruits et tous les émoluments ; et, comme un des plus considérables était les profits judiciaires (freda) que l’on recevait par les usages des Francs, il suivait que celui qui avait le fief avait aussi la justice, qui ne s’exerçait que par des compositions aux parents et des profits au seigneur. Elle n’était autre chose que le droit de faire payer les compositions de la loi, et celui d’exiger les amendes de la loi.

On voit, par les formules qui portent la confirmation ou la translation à perpétuité d’un fief en faveur d’un leude ou fidèle, ou des privilèges des fiefs en faveur des églises, que les fiefs avaient ce droit. Cela paraît encore par une infinité de chartres qui contiennent une défense aux juges ou officiers du roi d’entrer dans le territoire, pour y exercer quelque acte de justice que ce fût, et y exiger quelque émolument de justice que ce fût. Dès que les juges royaux ne pouvaient plus rien exiger dans un district, ils n’entraient plus dans ce district ; et ceux à qui restait ce district y faisaient les fonctions que ceux-là y avaient faites.

Il est défendu aux juges royaux d’obliger les parties de donner des cautions pour comparaître devant eux :