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C’est donc une regle : l’or est commun quand l’argent est rare, & l’or est rare quand l’argent est commun. Cela fait sentir la différence de l’abondance & de la rareté relative, d’avec l’abondance & la rareté réelle ; chose dont je vais beaucoup parler.


CHAPITRE X.

Du change.


C’EST l’abondance & la rareté relative des monnoies des divers pays, qui forment ce qu’on appelle le change.

Le change est une fixation de la valeur actuelle & momentanée des monnoies.

L’argent, comme métal, a une valeur, comme toutes les autres marchandises ; & il a encore une valeur qui vient de ce qu’il est capable de devenir le signe des autres marchandises : &, s’il n’étoit qu’une simple marchandise, il ne faut pas douter qu’il ne perdît pas beaucoup de son prix.

L’argent, comme monnoie, a une valeur que le prince peut fixer dans quelques rapports, & qu’il ne sçauroit fixer dans d’autres.

Le prince établit une proportion entre une quantité d’argent comme métal, & la même quantité comme monnoie : 2°. Il fixe celle qui est entre divers métaux employés à la monnoie : 3°. Il établit le poids & le titre de chaque piece de monnoie : enfin, il donne à chaque piece cette valeur idéal dont j’ai parlé. J’appellerai la valeur de la monnoie, dans ces quatre rapports, valeur positive, parce qu’elle peut être fixée par une loi.

Les monnoies de chaque état ont, de plus, une valeur relative, dans le sens qu’on les compare avec les autres monnoies des autres pays : c’est cette valeur relative que le change établit : elle dépend beaucoup de la va-