Page:Montesquieu - Esprit des Lois - Tome 2.djvu/379

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plus, ou ce qu’elle avait hypothéqué de mille manières ? Le clergé a toujours acquis, il a toujours rendu, et il acquiert encore.


Chapitre XI.

État de l’Europe du temps de Charles Martel.


Charles Martel, qui entreprit de dépouiller le clergé, se trouva dans les circonstances les plus heureuses : il était craint et aimé des gens de guerre, et il travaillait pour eux ; il avait le prétexte de ses guerres contre les Sarrasins  ; quelque haï qu’il fût du clergé, il n’en avait aucun besoin ; le pape, à qui il était nécessaire, lui tendait les bras : on sait la célèbre ambassade que lui envoya Grégoire III. Ces deux puissances furent fort unies, parce qu’elles ne pouvaient se passer l’une de l’autre : le pape avait besoin des Francs pour le soutenir contre les Lombards et contre les Grecs ; Charles Martel avait besoin du pape pour humilier les Grecs, embarrasser les Lombards, se rendre plus respectable chez lui, et accréditer les titres qu’il avait, et ceux que lui ou ses enfants pour-raient prendre. Il ne pouvait donc manquer son entreprise.

Saint Eucher, évêque d’Orléans, eut une vision qui