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XVI
LE LIBRAIRE AU LECTEUR

point quelque chose qui pût donner du crédit à mon livre, et faire ma petite fortune.

Ce n’est pas que je voulusse en mon particulier me brouiller ouvertement avec les magistrats ; je souhaiterois que l’attention du public fût réveillée et non pas la leur.

Un bel esprit[1] qui vient quelquefois dans ma boutique où nous l’écoutons beaucoup, soutenoit, l’autre jour, qu’il n’y avoit pas un mot de vray dans toute mon Histoire véritable. Ce qui luy a fait prendre cette opinion, c’est que mademoiselle de Scudéry s’est servie d’une idée à peu près pareille pour en orner un de ses romans.

D’ailleurs, les Aventures du mandarin Fun-Hoam ont été regardées comme fabuleuses par tous les critiques.

Je ne suis qu’un pauvre libraire et je ne scay guère bien ce qui en est ; mais le public peut achepter mon livre comme roman, s’il ne juge pas à propos de l’achepter comme histoire.

  1. Le manuscrit portait un « scavant ». Montesquieu a effacé le mot, et l’a remplacé par celui que nous imprimons.