Page:Montesquieu - Lettres persanes I, 1873.djvu/28

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tu crains le relâchement des lois de la pudeur et de la modestie.

Souviens-toi toujours du néant d’où je t’ai fait sortir, lorsque tu étois le dernier de mes esclaves, pour te mettre en cette place, et te confier les délices de mon cœur : tiens-toi dans un profond abaissement auprès de celles qui partagent mon amour ; mais fais-leur en même temps sentir leur extrême dépendance. Procure-leur tous les plaisirs qui peuvent être innocents ; trompe leurs inquiétudes ; amuse-les par la musique, les danses, les boissons délicieuses ; persuade-leur de s’assembler souvent. Si elles veulent aller à la campagne, tu peux les y mener ; mais fais faire main-basse sur tous les hommes qui se présenteront devant elles. Exhorte-les à la propreté, qui est l’image de la netteté de l’âme ; parle-leur quelquefois de moi. Je voudrois les revoir, dans ce lieu charmant qu’elles embellissent. Adieu.

De Tauris, le 18 de la lune de Saphar, 1711.


LETTRE III.

ZACHI À USBEK.
À Tauris.


Nous avons ordonné au chef des eunuques de nous mener à la campagne ; il te dira qu’aucun accident ne nous est arrivé. Quand il fallut traverser la rivière et quitter nos litières, nous nous mîmes, selon la coutume, dans des boîtes : deux