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Page:Montesquieu - Pensées et Fragments inédits, t1, 1899.djvu/124

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à Polybe, qui a admirablement bien expliqué quelle part les consuls, le Sénat, le Peuple, prenoient dans ce gouvernement ; d’autant mieux qu’il parle d’un temps où la République venoit d’échapper 5 à de si grands périls et faisoit actuellement de si grandes choses.

159* (1674. III, f° 17 v°). — Le peuple de Rome, avec une haine toujours active contre les nobles, changea de moyens sans changer de fin: d’abord, 10 il songea à les abaisser en diminuant leurs privilèges ; et, ensuite, en augmentant l’autorité d’un seul.

Le peuple d’Athènes avoit une jalousie naturelle contre tous ceux qui l’avoient servi avec quelque

i 5 gloire. Il s’en défaisoit une fois pour ne les pas craindre toujours. A Rome, au contraire, le Peuple adoroit ceux qui, par leurs exploits, s’étoient mis au-dessus des autres, et les comblant toujours de nouveaux honneurs, il sembloit vouloir les porter

a0 lui-même à la tyrannie. C’est que le peuple d’Athènes, composé de citoyens choisis, se sentoit libre, et que cette immense populace de Rome se jugeoit esclave. Celui-là ne craignoit rien que de l’ambition de ses principaux citoyens ; celle-ci n’espéroit que

a5 de la faveur de ceux qui avoient fait de grandes choses, et, toutes les fois qu’elle entendoit parler des victoires de quelque général, il l’appeloit dans son cœur contre une orgueilleuse noblesse. Le peuple d’Athènes n’étant pas nombreux, les gens

30 sensés se faisoient entendre et trouvoient le moyen