Page:Montesquieu - Pensées et Fragments inédits, t1, 1899.djvu/143

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203* (1872. III, f 113 v°). — J’ai travaillé vingt ans de suite à cet ouvrage, et je ne sais pas encore si j’ai été hardi, ou si j’ai été téméraire, si j’ai été accablé par la grandeur, ou si j’ai été soutenu par la majesté de mon sujet. 5

204* (1706. III, f° 42). — Que me serviroit d’avoir fait des réflexions pendant vingt années, si j’avois manqué la première de toutes : que la vie est courte? Je n’ai pas même le temps d’abréger ce que j’ai fait.

205* (1705. III, f°4i v°). — Préface. — Je ne cessois 10 d’envoyer aux vents..., perdant mes peines à réformer ce qui ne devoit jamais voir le jour.

206* (1805. III, f° 80 v°). — J’avois conçu le dessein de donner plus d’étendue et plus de profondeur à quelques endroits de cet ouvrage ; j’en suis devenu 15 incapable. Mes lectures ont affoibli mes yeux, et il me semble que ce qui me reste encore de lumière n’est que l’aurore du jour où ils se fermeront pour jamais.

Je touche presque au moment où je dois com- 20 mencer et finir, au moment qui dévoile et dérobe tout, au moment mêlé d’amertume et de joye, au moment où je perdrai jusqu’à mes foiblesses mêmes.

Pourquoi m’occuperois-je encore de quelques écrits frivoles? Je cherche l’immortalité, et elle est 25 dans moi-même. Mon âme, agrandissez-vous! Précipitez-vous dans l’immensité ! Rentrez dans le grand Être!...