Page:Montesquieu - Pensées et Fragments inédits, t1, 1899.djvu/438

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des loix civiles, ce que le Droit naturel avoit fait d’abord.

Le hasard et le tour d’esprit de ceux qui ont convenu ont établi autant de différentes formes de 5 gouvernements qu’il y a eu de peuples : toutes bonnes, puisqu’elles étoient la volonté des parties contractantes.

Ce qui étoit arbitraire est devenu nécessité ; il n’a plus été permis qu’à la tyrannie et à la violence de 10 changer une forme de gouvernement, même pour une meilleure : car, comme tous les associés ne pouvoient point changer de manière de penser en même temps, il y auroit eu un temps, entre l’établissement des nouvelles loix et l’abolition des anciennes, fatal i5 à la cause commune.

Il a fallu que tous les changements arrivés dans les loix établies fussent un effet de ces loix établies : celui qui a aboli d’anciennes loix ne l’a pu faire que par la force des loix ; et le Peuple même n’a pu 20 reprendre son autorité que lorsque cela lui a été permis par la Loi civile ou naturelle.

Ce qui n’étoit que convention est devenu aussi fort que la Loi naturelle ; il a fallu aimer sa patrie comme on aimoit sa famille ; il a fallu chérir les -5 loix comme on chérissoit la volonté de ses pères.

Mais, comme l’amour de sa famille n’entraînoit pas la haine des autres, aussi l’amour de sa Patrie ne devoit point inspirer la haine des autres sociétés.

617* (1268. II, f° 123). — Les Espagnols oublièrent 3o les devoirs de l’Homme à chaque pas qu’ils firent