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Page:Montesquieu - Pensées et Fragments inédits, t1, 1899.djvu/494

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qui veuille donner à ces paroles un sens étroit, ni dire que Dieu ait véritablement haï Ésaii, ni endurci personne. Et certainement le raisonnement que saint Paul fait ensuite prouve bien clairement qu’il n’a 5 point voulu dire que Dieu ait jamais pu faire un décret de réprobation, ou (si vous voulez) fait que tous ceux qu’il n’a pas prédestinés au salut fussent destinés à la colère, parce qu’on feroit faire un faux raisonnement à l’Apôtre. « O Homo, tu quis es qui

:o respondeas Deo ? Numquid dicit figmentum ei qui se finxit : « Quid me fecisti sic ? » Annon habet potestatem figulus luti ex eadem massa facere aliud quidem vas in honorem, aliud vero in contumeliam ? » Si saint Paul parloit d’une prédestination sans laquelle

i5 on ne peut être sauvé, il raisonneroit mal : car l’Homme ne se plaindroit pas de ce que Dieu l’auroit fait d’une certaine manière, mais de ce qu’il le puniroit parce qu’il seroit ainsi sorti de sa main : injustice criante ! Il faut donc que saint Paul ne parle

20 ici de la prédestination que de la manière que je l’entends, c’est-à-dire d’une prédestination que Dieu accorde quelquefois à l’Homme : avec laquelle, il est infailliblement sauvé ; mais, sans laquelle, il ne laisse pas de pouvoir être sauvé. Aussi n’y a-t-il qu’à

ii voir sur quoi saint Paul raisonne dans ce chapitre, les précédents et les suivants : ce n’est que sur la vocation des Gentils, qu’il a prédestinés, et qu’il a appelés gratuitement : vocation qu’il (sic) n’a pourtant pas exclu les Juifs du salut ; c’est pour faire

30 taire les murmures des Juifs, qui se plaignoient de ce qu’on ne les distinguoit pas des Gentils. Les