Page:Montesquieu - Pensées et Fragments inédits, t2, 1901.djvu/217

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ils n’ont pas les mêmes idées. La philosophie grecque nous est très inconnue : nous n’en avons guère que quelques fragments dans Diogène de Laërte, auteur peu exact. Aristote et Platon sont les deux seuls originaux qui nous restent ; Platon ne dit 5 presque rien que des paroles, et Aristote est très obscur. Il ne faut que ce que nous savons des systèmes de ces philosophes pour nous faire voir que nous ne les avons pas. Ainsi, quand un philosophe nous dit que le principe des choses est l’eau, 1o nous voyons bien que nous n’avons qu’un mot, et que nous ignorons le sens. Mais, si nous ne savons presque rien de la philosophie des Grecs, combien ignorons-nous celle des Égyptiens, des Perses et des Chaldéens. Si nous savons la philosophie des .5 Grecs comme un dixième est à un, nous ne savons celle des Égyptiens que comme un deux-centième est à un ; et celle des Perses et Chaldéens comme un millième est à un. Ainsi on ne peut faire un système commun de ces trois religions. J’ajoute 2o que l’idée des trois états ne se trouve pas même dans la philosophie grecque, qui est la plus connue. L’idée de l’âge d’or des Grecs, qu’on veut qui réponde à l’état d’innocence chez les Hébreux et Chrétiens, ne vient pas de la même origine : elle 35 n’est venue aux Grecs que de la vie pastorale, qui étoit innocente et tranquille, et que les hommes quittèrent pour aller habiter les villes ; ce qui fut suivi du commerce, de l’industrie, des arts, des affaires et, par conséquent, des crimes, qui engen- 3o drèrent le siècle de fer. L’abbé de Mongaut croit