Du principe du gouvernement despotique.
Comme il faut de la vertu dans une république, & dans une monarchie de l’honneur, il faut de la crainte dans un gouvernement despotique : pour la vertu, elle n’y est point nécessaire ; & l’honneur y seroit dangereux.
Le pouvoir immense du prince y passe tout entier à ceux à qui il le confie. Des gens capables de s’estimer beaucoup eux-mêmes, seroient en état d’y faire des révolutions. Il faut donc que la crainte y abatte tous les courages, & y éteigne jusqu’au moindre sentiment d’ambition.
Un gouvernement modéré peut, tant qu’il veut, & sans périr, relâcher ses ressorts. Il se maintient par ses lois & par sa force même. Mais lorsque, dans le gouvernement despotique, le prince cesse un moment de lever le bras ; quand il ne peut pas anéantir à l’instant ceux qui ont les premieres places[1], tout est perdu :
- ↑ Comme il arrive souvent dans l’aristocratie militaire.