car le ressort du gouvernement, qui est la crainte, n’y étant plus, le peuple n’a plus de protecteur.
C’est apparemment dans ce sens que des cadis ont soutenu que le grand-seigneur n’étoit point obligé de tenir sa parole ou son serment, lorsqu’il bornoit par-là son autorité[1].
Il faut que le peuple soit jugé par les lois, & les grands par la fantaisie du prince ; que la tête du dernier sujet soit en sureté, & celle des bachas toujours exposée. On ne peut parler sans frémir de ces gouvernemens monstrueux. Le sophi de Perse détrôné de nos jours par Mirivéis, vit le gouvernement périr avant la conquête, parce qu’il n’avoit pas versé assez de sang[2].
L’histoire nous dit que les horribles cruautés de Domitien effrayerent les gouverneurs, au point que le peuple se rétablit un peu sous son regne[3]. C’est ainsi qu’un torrent qui ravage tout d’un côté, laisse de l’autre des campagnes où l’œil voit de loin quelques prairies.