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Liv. VI. Chap. XII.

cela vient de la tyrannie, qui a infligé les mêmes peines aux scélérats & aux gens de bien.

Et si vous en voyez d’autres, où les hommes ne sont retenus que par des supplices cruels, comptez encore que cela vient en grande partie de la violence du gouvernement, qui a employé ces supplices pour des fautes légeres.

Souvent un législateur, qui veut corriger un mal, ne songe qu’à cette correction ; ses yeux sont ouverts sur cet objet, & fermés sur les inconvéniens. Lorsque le mal est une fois corrigé, on ne voit plus que la dureté du législateur : mais il reste un vice dans l’état que cette dureté a produit ; les esprits sont corrompus, ils se sont accoutumés au despotisme.

Lysandre[1] ayant remporté la victoire sur les Athéniens, on jugea les prisonniers ; on accusa les Athénienes d’avoir précipité tous les captifs de deux galeres, & résolu en pleine assemblée de couper le poing aux prisonniers qu’ils feroient. Ils furent tous égorgés, excepté Adymante, qui s’étoit opposé à ce décret. Lysandre reprocha à Phi-

  1. Xénophon, hist. liv. II.