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De l’esprit des Lois,

nous faisant connoître l’esprit de ces regnes, ils nous font connoître l’esprit de ces jugemens.

Auguste & Tibere songerent principalement à punir les débauches de leurs parentes. Ils ne punissoient point le déréglement des mœurs, mais un certain crime d’impiété ou de lese-majesté[1] qu’ils avoient inventé, utile pour le respect, utile pour leur vengeance. De-là vient que les auteurs Romains s’élevent si fort contre cette tyrannie.

La peine de la loi Julie étoit légere[2]. Les empereurs voulurent que dans les jugemens on augmentât la peine de la loi qu’ils avoient faite. Cela fut le sujet des invectives des historiens. Ils n’examinoient pas si les femmes méritoient d’être punies, mais si l’on avoit violé la loi pour les punir.

Une des principales tyrannies de Tibere[3] fut l’abus qu’il fit des anciennes

  1. Culpam inter viros & feminas vulgatam gravi nomine lsarum religionum appeliando, clementiam majorum suasque ipse leges egrediebatur. Tacite, Annal. liv. III.
  2. Cette loi est rapportée au digeste ; mais on n’y a pas mis la peine. On juge qu’elle n’étoit que de la relégation, puisque celle de l’inceste n’étoit que de la déportation. Leg. si quis viduam, ss. de quest.
  3. Proprium id Tiberio suit, sceiera nuper reperto priscis verbis obtegere, Tacit.