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Liv. VIII. Chap. II.

plus attachés à l’éloquence qu’à l’art militaire : outre qu’il y avoit dans le cœur de tous les Grecs une haine implacable contre ceux qui renversoient le gouvernement républicain ; ce qui fit que l’anarchie dégénéra en anéantissement, au lieu de se changer en tyrannie.

Mais Syracuse, qui se trouva placée au milieu d’un grand nombre de petites oligarchies changées en tyrannie[1] ; Syracuse qui avoit un Sénat[2] dont il n’est presque jamais fait mention dans l’histoire, essuya des malheurs que la corruption ordinaire ne donne pas. Cette ville toujours dans la licence[3] ou dans l’oppression, également travaillée par sa liberté & par sa servitude, recevant toujours l’une & l’autre comme une tempête ; & malgré sa puissance

  1. Voyez Plutarque, dans les vies de Timoléon & de Dion.
  2. C’est celui des six cents, donc parle Diodore.
  3. Ayant chassé les tyrans, ils firent citoyens des étrangers & des soldats mercenaires, ce qui causa des guerres civiles : Aristote, Politiq. liv. V, ch. III. Le peuple ayant été cause de la victoire sur les Athéniens, la république fut changée, ibid. ch. IV. La passion de deux jeunes magistrats, dont l’un enleva à l’autre un jeune garçon, & celui-ci débaucha sa femme, fit changer la forme de cette république : ibid. Liv. VII, chap. IV.