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de M. de Montesquieu.

soigneusement les vastes pays arrosés par le Rhin. Et il ne lui resta plus rien à voir en Allemagne, car Frédéric ne régnoit pas encore. Il s’arrêta ensuite quelque temps dans les Provinces-Unies, monument admirable de ce que peut l’industrie humaine, animée par l’amour de la liberté. Enfin il se rendit en Angleterre, où il demeura deux ans. Digne de voir & d’entretenir les plus grands hommes, il n’eut à regretter que de n’avoir pas fait plutôt ce voyage. Locke & Newton étoient morts. Mais il eut souvent l’honneur de faire sa cour à leur protectrice, la célebre reine d’Angleterre, qui cultivoit la philosophie sur le trône, & qui goûta, comme elle le devoit, M. de Montesquieu. Il ne fut pas moins accueilli par la nation, qui n’avoit pas besoin, sur cela, de prendre le ton de ses maîtres. Il forma à Londres des liaisons intimes avec des hommes exercés à méditer, & à se préparer aux grandes choses par des études profondes. Il s’instruisit avec eux de la nature du gouvernement, & parvint à le bien connoître. Nous parlons ici d’après les témoignages publics que lui ont rendu les Anglois eux-mêmes, si jaloux de nos avantages, & si peu disposés à reconnoître en nous aucune supériorité.

Comme il n’avoit rien examiné, ni avec la prévention d’un enthousiaste, ni avec