Page:Montesquieu Esprit des Lois 1777 Garnier 2.djvu/34

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
2
De l’esprit des Lois,

l’état, & aux nécessités des citoyens. Il ne faut point prendre au peuple sur ses besoins réels, pour des besoins de l’état imaginaires.

Les besoins imaginaires sont ce que demandent les passions & les foiblesses de ceux qui gouvernent, le charme d’un projet extraordinaire, l’envie malade d’une vaine gloire, & une certaine impuissance d’esprit contre les fantaisies. Souvent ceux qui avec un esprit inquiet étoient sous le prince à la tête des affaires, ont pensé que les besoins de l’état étoient les besoins de leurs petites ames.

Il n’y a rien que la sagesse & la prudence doivent plus régler, que cette portion qu’on ôte, & cette portion qu’on laisse aux sujets.

Ce n’est point à ce que le peuple peut donner, qu’il faut mesurer les revenus publics, mais à ce qu’il doit donner : Et si on les mesure à ce qu’il peut donner, il faut que ce soit du moins à ce qu’il peut toujours donner.