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Liv. XIV. Chap. XIV.

gination, elle punissoit celui des yeux. Mais lorsqu’une nation Germanique se fut transportée en Espagne, le climat trouva bien d’autres lois. La loi des Wisigoths défendit aux médecins de saigner une femme ingénue, qu’en présence de son pere ou de sa mere, de son frere, de son fils ou de son oncle. L’imagination des peuples s’alluma, celle des législateurs s’échauffa de même ; la loi soupçonna tout, pour un peuple qui pouvoit tout soupçonner.

Ces lois eurent donc une extrême attention sur les deux sexes. Mais il semble que, dans les punitions qu’elles firent, elles songerent plus à flatter la vengeance particuliere, qu’à exercer la vengeance publique. Ainsi dans la plupart des cas, elles réduisoient les deux coupables dans la servitude des parens ou du mari offensé. Une femme[1] ingénue, qui s’étoit livrée à un homme marié, étoit remise dans la puissance de sa femme, pour en disposer à sa volonté. Elles obligeoient les esclaves[2] de lier & de présenter au mari sa femme qu’ils surprenoient en adultere : elles

  1. Loi des Wisigoths, liv. III. tit. 4. §. 9.
  2. Ibid. liv. III, tit. 4. §. 6.