Page:Montesquieu Esprit des Lois 1777 Garnier 2.djvu/91

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
59
Liv. XIV. Chap. XV.

famille, en établissent un comme magistrat sur les quatre autres ; ces lois qui, pour un seul crime, punissent toute une famille ou tout un quartier ; ces lois, qui ne trouvent point d’innocens là où il peut y avoir un coupable, sont faites pour que tous les hommes se méfient les uns des autres, pour que chacun recherche la conduite de chacun, & qu’il en soit l’inspecteur, le témoin & le juge.

Le peuple des Indes au contraire est doux[1], tendre, compatissant. Aussi ses législateurs ont-ils eu une grande confiance en lui. Ils ont établi peu[2] de peines, & elles sont peu séveres ; elles ne sont pas même rigoureusement exécutées. Ils ont donné les neveux aux oncles, les orphelins aux tuteurs, comme on les donne ailleurs à leurs peres : ils ont réglé la succession par le mérite reconnu du successeur. Il semble qu’ils ont pensé que chaque citoyen devoit se reposer sur le bon naturel des autres.

  1. Voyez Bernier, tome II. p. 140.
  2. Voyez dans le quatorzieme recueil des lettres édifiantes, p. 403. les principales lois ou coutumes des peuples d’Inde de la presqu’île deçà le Gange.