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De l’esprit des Lois,

intelligens ne suivent pas toujours leurs lois. Qui le diroit ! des idées religieuses ont souvent fait tomber les hommes dans ces égaremens. Si les Assyriens, si les Perses ont épousé leurs meres, les premiers l’ont fait par un respect religieux pour Sémiramis ; & les seconds, parce que la religion de Zoroastre donnoit la préférence[1] à ces mariages. Si les Égyptiens ont épousé leurs sœurs, ce fut encore un délire de la religion Égyptienne, qui consacra ces mariages en l’honneur d’Isis. Comme l’esprit de la religion est de nous porter à faire avec effort des choses grandes & difficiles, il ne faut pas juger qu’une chose soit naturelle, parce qu’une religion fausse l’a consacrée.

Le principe que les mariages entre les peres & les enfans, les freres & les sœurs, sont défendus pour la conservation de la pudeur naturelle dans la maison, servira à nous faire découvrir quels sont les mariages défendus par la loi naturelle, & ceux qui ne peuvent l’être que par la loi civile.

  1. Ils étoient regardés comme plus honorables. Voyez Philon, de specialibus legibus quæ pertinent ad præcepta decalogi, Paris, 1640. p. 778.