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De l’esprit des Lois,

cela ne peut être. Le roi Pepin[1] ordonna que par-tout où il n’y auroit point de loi, on suivroit la coutume ; mais que la coutume ne seroit pas préférée à la loi. Or, dire que le droit Romain eût la préférence sur les codes des lois des Barbares, c’est renverser tous les monumens anciens, & sur-tout ces codes des lois des Barbares qui disent perpétuellement le contraire.

Bien loin que les lois des peuples Barbares fussent ces coutumes, ce furent ces lois mêmes, qui, comme lois personnelles, les introduisirent. La loi salique, par exemple, étoit une loi personnelle : mais dans des lieux généralement ou presque généralement habités par des Francs Saliens, la loi salique, toute personnelle qu’elle étoit, devenoit, par rapport à ces Francs Saliens, une loi territoriale, & elle n’étoit personnelle que pour les Francs qui habitoient ailleurs. Or, si dans un lieu où la loi salique étoit territoriale, il étoit arrivé que plusieurs Bourguignons, Allemands ou Romains même, eussent eu souvent des affaires, elles auroient été décidées par les lois de ces peuples ;

  1. Loi des Lombards, liv. II, tit. 41, §. 6.