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De l’esprit des Lois,


La loi des Francs Ripuaires avoit tout un autre esprit[1] ; elle se contentoit des preuves négatives ; & celui contre qui on formoit une demande ou une accusation, pouvoit, dans la plupart des cas se justifier, en jurant avec certain nombre de témoins qu’il n’avoit point fait ce qu’on lui imputoit. Le nombre[2] des témoins qui devoient jurer, augmentoit selon l’importance de la chose ; il alloit quelquefois[3] à soixante-douze. Les lois des Allemands, des Bavarois, des Thiringiens, celles des Frisons, des Saxons, des Lombards & des Bourguignons, furent faites sur le même plan que celles des Ripuaires.

J’ai dit que la loi salique n’admettoit point les preuves négatives. Il y avoit pourtant un cas[4] où elle les admettoit ; mais dans ce cas elle ne les admettoit point seules & sans le concours

  1. Cela se rapporte à ce que dit Tacite, que les peuples Germains avoient des usages communs, & des usages particuliers.
  2. Lois des Ripuaires, tit. §, 7, 8 & autres.
  3. Ibid. tit. 11, 12 & 17.
  4. C’est celui où un antrustion, c’est-à-dire, un vassal du roi, en qui on supposoit une plus grande franchise, étoit accusé : voyez le tit. 76 du Pactus legis salicæ.