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De l’esprit des Lois,


Les gentilshommes[1] se battoient entr’eux à cheval & avec leurs armes, & les villains[2] se battoient à pied & avec le bâton. De là il suivit que le bâton étoit l’instrument des outrages[3], parce qu’un homme qui en avoit été battu, avoit été traité comme un villain.

Il n’y avoit que les villains qui combattissent à visage découvert[4] ; ainsi il n’y avoit qu’eux qui pussent recevoir des coups sur la face. Un soufflet devint une injure, qui devoit être lavée par le sang ; parce qu’un homme qui l’avoit reçu, avoit été traité comme un villain.

Les peuples Germains n’étoient pas moins sensibles que nous au point d’honneur ; ils l’étoient même plus. Ainsi les parens les plus éloignés prenoient une part très-vive aux injures, & tous leurs codes sont fondés là-dessus. La loi des Lombards[5] veut que celui qui,

  1. Voyez, sur les armes des combattans, Beaumanoir, ch. lxi, p. 308, & ch. lxiv, p. 328.
  2. Ibid. ch. lxiv, page 328 : voyez aussi les chartres de Saint-Aubin d’Anjou, rapportées par Galland, page 163.
  3. Chez les Romains, les coups de bâton n’étoient point infames. Lege Ictus sustium. De iis qui notantur infamiâ.
  4. Ils n’avoient que l’écu & le bâton, Beaumanoir, chap. lxiv, page 328.
  5. Liv. I, tit. 6. §. I.