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« Un long temps ne s’écoulera pas que votre prospérité, vos lois ne l’expient.

« Vos ministres, par leurs instructions, ont assez prouvé qu’ils voulaient se défaire de moi.

« Pourquoi les rois qui m’ont proscrit n’ont-ils pas osé ordonner ouvertement ma mort ? L’un eût été aussi légal que l’autre ! Une fin prompte eût montré plus d’énergie de leur part que la mort lente à laquelle on me condamne !

« Je ne me tuerai pas, ce serait une lâcheté ; il est noble et courageux de surmonter l’infortune. Chacun ici-bas est tenu de remplir son destin. Mais, si l’on compte me tenir ici, vous me devez la mort comme un bienfait, car ma demeure ici est une mort de chaque jour.

« L’île est trop petite pour moi qui faisais tous les jours plusieurs lieues à cheval. Le climat n’est pas le nôtre ; ce n’est ni notre soleil, ni nos saisons. Tout ici respire un ennui mortel. La position est désagréable, insalubre ; il n’y a point d’eau, ce coin de l’île est désert, il a repoussé ses habitants.

« Ce n’est point une maison, ce ne sont pas des meubles qu’il fallait m’envoyer, mais, bien plutôt, un bourreau et un linceul ! »