Page:Montholon - Souvenirs de Sainte-Hélène, 1901.pdf/42

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Philibert avait l’ordre secret de ne pas appareiller. Le duc de Rovigo dit dans ses Mémoires que le duc de Vicence, qui faisait partie du gouvernement provisoire, et le général Becker avaient connaissance de cet ordre et ne l’avaient pas communiqué à l’Empereur.

Une nuit, le capitaine Ponet nous dit : « Le vent est bon, qui empêche qu’on ne mette à la voile ? Si les Anglais attaquent, je soutiendrai le combat, et pendant ce temps la Saale passera. » Je me voyais déjà à fond de cale, et s’il en eût été ainsi et que je fusse restée sur la Méduse, il est vraisemblable que la prédiction du général de Flahaut se serait vérifiée. La nuit se passa avec vent favorable et point d’ordre de départ. Le pauvre capitaine jurait comme un marin et piétinait de colère. Pour lui et nous, tout était compris. Il fit dire à l’Empereur par le général Montholon que, s’il voulait venir à son bord, il avait l’espoir de franchir la croisière ; que sa frégate roulait comme une barigue (ce fut son expression), ou bien que la Saale essayât de passer et que pendant ce temps la Méduse livrerait combat. On aurait bien pu forcer le capitaine Philibert à appareiller ; mais on prit un autre parti.