idée, se rappelle les expressions dures qui lui sont échappées, se les exagère encore, et finit par ne plus voir dans le procédé du comte que le désir ardent de s’éloigner d’elle à tout prix, et la crainte de vivre avec une femme capricieuse, injuste, qui se laisse prévenir, avec un enfant volontaire, opiniâtre, déraisonnable ; car c’est ainsi qu’il doit me voir, qu’il me voit sans doute ; et je l’ai bien mérité ! Qui sait encore s’il n’est pas instruit de mes sentimens pour son ami ? Ils demeurent ensemble ; et le comte est si pénétrant ! Me parleroit-il de lui, de cette passion malheureuse, s’il en ignoroit l’objet ? Il le connoît sans doute ; et sa délicatesse m’épargne les reproches qu’il sent bien que je dois me faire à moi-même. Que lui importe, d’ailleurs, à qui appartienne ce cœur ingrat et dur qui l’a repoussé, qui le force à présent à chercher le bonheur dans des climats éloignés ? Voilà l’imagination de Caroline qui travaille, qui lui peint tout
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