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de lichtfield.

ses femmes ; et dans ces momens même, il avoit un air si contraint, si malheureux ; il paroissoit si fort redouter de la regarder, de s’approcher d’elle, qu’elle ne douta plus du tout de son indifférence, peut-être même de sa haine.

Cette conduite, loin de l’irriter, la toucha sensiblement. Elle n’en accusoit qu’elle-même et ses caprices passés. Peut-être il vouloit la punir, et il en avoit bien le droit, ou plutôt cet injuste éloignement qu’elle lui avoit marqué si long-temps, l’avoit enfin révolté tout-à-fait contre elle. Mais les soins si tendres et si soutenus du comte pendant sa maladie et dans les premiers momens de son affliction ? Elle ne les attribuoit plus qu’à cette générosité qui lui étoit naturelle, qu’à cette pitié que tout être souffrant excite dans un cœur bon et sensible ; mais elle voit trop bien à présent qu’il déteste ses liens, qu’il gémit de la fatalité qui les a rapprochés. Elle se rappelle son projet d’absence,