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caroline

bonheur, quand une réflexion cruelle vint le troubler et m’arrêter. C’étoit aux dépens d’un ami que j’allois être heureux, et cet ami étoit dans le cas de me croire perfide. Je ne pus soutenir cette idée : vous êtes fait, mon cher comte, pour comprendre tout ce que j’éprouvai, même par les souvenirs qu’elle me retraça. C’étoit la seconde fois que l’amour et l’amitié étoient en opposition dans mon cœur : l’amitié devoit toujours l’emporter. Il me fut impossible de lire mes lettres avant de m’être justifié auprès de Manteul, avant d’avoir, pour ainsi dire, son aveu.

Je les serrai dans mon bureau, et je me hâtai d’aller le chercher. J’allai d’abord au café qu’il m’indiquoit ; il n’y étoit pas encore. J’aurois dû l’attendre ; mais l’attente dans ce moment-là n’étoit pas supportable, et je préférai de le chercher ailleurs. J’aimois mieux lui parler que lui écrire : une lettre assez détaillée pour lui donner la clef de ma conduite n’alloit pas à mon impa-