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LE FRONT CONTRE LA VITRE

refusée aux autres, et c’est en cela surtout qu’il est demeuré français. Aussi son cœur a-t-il battu vers vous dès l’instant où vos armes ont eu à défendre les traités et à barrer la route interdite. Il a suivi les étapes d’une résistance que conduisait la liberté, il a partagé chaque jour un peu de votre grande pitié ; et, lorsqu’il a vu la Belgique dépossédée, réduite à un morceau de terre, fidèle quand même à ses drapeaux comme au dévouement de sa reine et à l’attitude de son roi-soldat, il s’est réfugié avec elle dans le cœur des Belges pour espérer encore.

Sa sympathie s’avivait d’ailleurs de communs souvenirs puisés dans la paix : vous aviez participé à sa vie intellectuelle et secondé son activité économique, vous aviez accueilli les siens, leur offrant le spectacle, dont ils vous savaient gré, d’une nation jalouse de son glorieux passé, éprise de travail et d’art, admirée pour la hardiesse de ses entreprises et la mesure de son esprit, où les idées qui divisent ordinairement les hommes se réduisent dans un effort commun vers le progrès. À tant de liens, vous en ajoutez aujourd’hui un autre : c’est parce qu’il n’était pas nécessaire que nous l’apprécions davantage.

Souffrez que je joigne à cette gratitude que je veux collective, un sentiment personnel. Je vous suis reconnaissant de m’avoir incité à écouter de plus près la langue que nous parlons et à reprendre un à un des mots que l’oreille, distraite par l’habitude, accueille sans les juger. Ces mots, du moins beaucoup d’entre eux, vous aurez vite constaté que je ne viens