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LE FRONT CONTRE LA VITRE

l’ennui. Mettons que c’est la manière de se servir du manuel qui est déplorable. Il faut, pour l’animer, faire sortir des mots leur valeur d’orientation ; on n’y arrivera qu’à la condition de dépasser le livre, d’en faire le point de départ d’une leçon projetée sur la réalité. Si on a pris la peine de regarder autour de soi, quelles ressources n’a-t-on pas alors !

Barrès glisse entre deux idées cette indication brève qui indique bien sa manière : « Donner un sens à la montagne ». Voilà ce dont il s’agit : donner un sens à la terre et à l’histoire. Le détail, recueilli avec patience et piété, nous y conduira, tous les détails et pas seulement celui qui traduit l’activité politique, tous les détails qui expriment notre humanité. « Ouvrir les fenêtres sur la vie », formule d’aération, reprise à notre profit par le chanoine Jean-Jean qui, lui, pouvait se payer le luxe d’être prophète en notre pays et de braver nos susceptibilités.

« Donner un sens à la montagne ». Notre vallée, qui paraît monotone à l’Européen, est enrichie du mouvement que lui communiquent les collines montérégiennes. Leur nom les rattache au Mont-Royal que Jacques Cartier baptisa. Nous les voyons, différentes selon que notre course nous entraîne : depuis Hochelaga, au moment de franchir le Saint-Laurent, depuis le vaste horizon que commande Saint-Sulpice, du tournant de Laprairie ou de la courbe du bassin de Chambly. Dans la brume matinale, elles gardent longtemps une douceur laiteuse, promesse d’un beau jour. Par vent d’est, quand l’atmosphère se purifie avant la pluie, ou dans