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Page:Montpetit - Au Service de la Tradition française, 1920.djvu/141

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bonnes et saines qualités françaises : la clarté, l’esprit, le sens critique. Il était bien nôtre, par la recherche de ses sujets, par ses coquetteries de couleur locale, par la tournure de ses railleries fines et drues. Il prisait la pointe et le mot, le mot pour vrai, ramassé dans la rue, monté d’une cour ou germé dans la serre chaude des salons. Il avait le sourire, comme on dit au Quartier. Et ce n’est pas une humeur tellement répandue parmi nous qu’il ne vaille pas la peine de s’y arrêter. Il s’amusait de nos habitudes nouvelles où il avait cru distinguer une teinte de snobisme, et il accentuait volontiers le contraste entre notre laisser-aller yankee et nos prétentions au génie latin.

Il remonte, chaque soir, des rues troublées par les affaires vers l’intimité reposante du foyer, évitant ainsi l’encombrement des tramways, l’heure du win-the-car, et il note le long de sa flânerie :

« Je montais à petits pas la rue Saint-Hubert, goûtant avec un plaisir extrême la pureté de l’air et la poésie de la nuit tombante. Cette promenade quotidienne, après le bureau, à l’heure où, dans les salons, les lampadaires s’allument projetant jusque dans la rue, à travers les persiennes mi-closes, leur lumière chatoyante, a pour moi un attrait toujours nouveau. Je marchais en songeant… Mon Dieu je ne sais plus à quoi, à toutes sortes de choses,… lorsque bientôt une musique douce, presque suave,