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LA TRADITION FRANÇAISE

elle, le petit-fils de Renan avait écrit la Veillée des Armes où la pensée individualiste, germée de Hégel et un instant propagée depuis les traductions de Nietzsche, se renonçait dans la rude acceptation de la discipline militaire. La jeune France entrait dans la carrière où les aînés vivaient encore.

Au moment où la guerre éclata, que l’on croyait impossible, chacun de nous s’interrogea sur votre pays. Nous cherchions, — vous verrez peut-être là une sympathie naïve — à distinguer ceux d’entre vos guerriers qui avaient connu la mêlée. Nos pensées s’arrêtaient plus longuement sur les officiers de vos conquêtes coloniales et sur les anciens lieutenants de 1870. Leurs noms étaient notre confiance. Le vôtre en est toujours. Vous aviez, peu avant, refusé le commandement suprême ; et fait passer en Joffre l’âme de votre choix. Délégué de l’armée, vous aviez appuyé, auprès des représentants de la Nation, la loi de trois ans. Au seuil de la retraite, ne vous réclamant que de votre conscience et de l’affection de vos soldats, vous aviez refusé l’épée d’honneur que l’on vous offrait : vous aviez la vôtre. Vous gardiez la foi qui est la vie. « Le triomphe est certain, disiez-vous, mais il faut que l’on sache que la lutte sera rude et difficile. Refusons-nous donc à des joies trop promptes et sachons que la sérénité, l’endurance, le sang-froid dans l’épreuve sont nos plus hautes vertus. Le