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L’ESTURGEON

DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE DE L’ESTURGEON


Dans son livre les Grandes pêches, le Dr Sauvage décrit le domaine de l’esturgeon dans les termes suivants : « Les deux grands groupes que les zoologistes admettent dans le genre esturgeon présentent de curieux faits de distribution géographique. Tous les esturgeons chez lesquels les épines sont placées à l’extrémité des écussons sont cantonnés dans les grands fleuves qui appartiennent au bassin hydrographique de la mer Caspienne et de la mer Noire ; les espèces chez lesquelles les épines des écussons sont centrales, comptent de très nombreux représentants dans les eaux douces de l’Amérique du nord, tant sur les versants du Pacifique que sur ceux de l’Atlantique. En règle générale, on peut dire que les esturgeons sont habitants de la zone tempérée, et surtout des régions froides de cette zone, quoiqu’ils ne semblent pas s’étendre, si ce n’est exceptionnellement, jusqu’aux eaux polaires. Les vastes lacs salés qui, à l’est de la Méditerranée, forment la mer Noire, la mer d’Azof et la mer Caspienne, sont leur principale demeure dans l’ancien monde ; plus à l’est encore, ils se trouvent dans les lacs de l’Asie centrale et jusque vers les frontières du Céleste Empire. De la mer Noire, ils se répandent dans la Méditerranée et dans l’Adriatique. Quelques espèces se pêchent sur les côtes ouest de l’Europe, dans les fleuves de l’Allemagne, de la Hollande, des Îles Britanniques, de la péninsule scandinave, de la France, d’Irlande.

D’après Duhamel du Monceau, en 1772, on le prenait en quantité, au moyen de filets, dans la rivière de Bordeaux : la pêche était très fructueuse, et durait depuis le mois de février jusqu’en juin ; actuellement, d’après M. Moreau, ces poissons pénètrent dans la Gironde, ne remontant la Dordogne qu’en très petit nombre, et accidentellement, gagnant plutôt la Garonne. Ce poisson s’engage de temps en temps dans la Seine, mais il s’avance rarement jusqu’à Paris ; cependant, rapporte Sonnini « on trouva un esturgeon dans des filets appelés gords, à Neuilly-sur-Seine, près de Paris, en 1800, année fertile en grands événements. Le poisson pesait deux cents livres, il avait six pieds et demi de long et près de quatre pieds de tour. On le fit conduire à la Malmaison dans une gondole remplie d’eau ; il y arriva vivant, et on le mit dans un des bassins du parc, où il resta quelque temps. Il fut ensuite transporté à Paris, dans une enceinte de planches disposée sur la Seine, et offert à la