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SOUVENIRS

Pierrefonds profile son robuste château, et dès Soissons, c’est la guerre. Nous faisons halte à Beaurieux, lieu de naissance du Père Marquette, où un aimable notaire a convoqué une délégation qui nous exprime la reconnaissance des autorités municipales à propos d’un don, venu du Canada pour aider à des réparations de guerre. Et voici le fameux Chemin des Dames, semé de cimetières et encore empli de tranchées et de fils de fer. La terre est lacérée, pétrie. On éprouve une sorte de vertige en pensant aux pauvres êtres ensevelis sous ces étendues mornes.

Arrivés le soir à Reims, nous allons contempler la cathédrale au clair de lune, et nous nous installons à l’Hôtel du Lion d’or qui n’a rien à envier aux hôtels de l’Amérique.

Le lendemain, on nous conduit sur la hauteur où se trouvait un fort, aujourd’hui ruiné, et d’où l’on se fait une idée des positions françaises et allemandes et comment se fit le bombardement systématique qui a réduit Reims en poussière. Dans la ville, quelques maisons étaient restées intactes : tout le reste n’était que débris ou tellement endommagé que la reconstruction s’imposait. Les habitants cherchaient l’emplacement de leur foyer parmi une navrante étendue grise. Les rues n’existaient plus. Il a fallu un an pour les déblayer. J’admire ces gens qui, au milieu d’une pareille épreuve, gardent la force de sourire.

Le maire, M. Roche, qui nous a fait visiter la ville, nous mène à la Cité rémoise — une cité ouvrière toute neuve et pimpante — où se dresse une église intéressante, une garderie, une Goutte de lait avec clinique prénatale et d’autres institutions. Des familles d’ouvriers et d’instituteurs voisinent assez heureusement dans ce centre qui manifeste,