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SOUVENIRS

qui lui apportera les armes nécessaires à sa défense. Nous avons une finance qui s’organise ; déjà les principes d’économie nationale orientent nos volontés. Il importe toutefois que l’argent, nécessaire et puissant, n’étouffe pas en nous un des caractères de l’âme française. Il ne saurait être question de l’acquérir au détriment de la culture ; mais bien de demander à la force économique un moyen d’étayer ce que nous voulons être.

Cela nous conduit à notre essor intellectuel, à nos fidélités d’esprit. Elles ne se gardent pas sans mal à côté d’une population de cent vingt millions d’âmes. Mais on saura sans doute avec émotion que nous avons conservé jalousement notre langue, que nous l’avons défendue et que nous tâchons de maintenir sur la terre américaine une discipline canadienne, d’expression française.

Notre rôle ne s’est pas borné là. Comment ignorer ce que les Canadiens français ont réalisé dans le domaine de la politique coloniale anglaise depuis Lafontaine et Cartier jusqu’à Laurier, une des plus belles figures qui aient illuminé notre histoire. Cet apport des nôtres se poursuit aujourd’hui dans le domaine international où se révèle indéniablement leur influence conciliante, de plus en plus libérée de l’emprise coloniale.

***

Nous prenons la mer à New York, à bord du De Grasse, de taille moyenne et large d’épaules. Il épouse la vague qui, après plusieurs jours de grand soleil et de langueur, se fait soudain mauvaise.

Un transatlantique n’est guère un lieu de recueillement ; j’envie ceux qui, comme André Siegfried, écrivent un livre au cours d’une traversée !