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SOUVENIRS

les traits d’une admirable figure. L’accueil grave, si large et si simple, de l’aristocratie bourgeoise, maîtresse de l’industrie textile, unie par l’indéfectible lien de la famille, solidement logée, fervente de la coopération et préoccupée du bien commun, estimant que « la question sociale ne réside pas seulement dans le salaire ». Grande vérité, qui était, en l’occurrence, le propos d’une femme.

Les champs amoureusement surveillés, assouplis au creux des vallons, dominés par des toits puissants. Dans la montagne, où je retrouvais les pins, où je les touchais, des maisons riantes où j’eusse aimé m’attarder. Dans les villes, des initiatives sociales. Le couvent des Sœurs de la Présentation de Marie, dont la supérieure, décorée de la Légion d’honneur pour fait de guerre, à qui nous disions au moment de l’adieu : « Nous avons torturé le règlement, ma sœur, il est midi et demi ! » Et qui nous répondait : — « Oh ! très agréablement et nous aimerions qu’il en fût souvent ainsi. » Des intérieurs comblés d œuvres d’où rayonnait la joie de merveilleux ensembles, où souriait l’intimité des choses religieusement groupées. De vieilles abbayes entourées de jardins renaissants. Des figures encore, des figures d’hommes et de femmes. si sympathiques à l’étranger de passage, marqué lui aussi du signe du souvenir ; à qui l’on reprochait pourtant, mais avec gentillesse et pour que le mot fût placé, car il n’y a guère d’analogie, « d’avoir opté ».

À Strasbourg, terme de notre voyage, un flot d’éloquence, comme il s’en déverse sur nos moindres rives. Habitude française et plutôt du midi, que je ne m’attendais pas à retrouver aux marches de l’Est, mais qui éclaire l’unité d’un caractère épris de mots. À l’Université, je relatai devant un