Page:Montpetit - Souvenirs tome III, 1955.djvu/145

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
145
VERS L’OUEST

La Plaine que j’ai tant de fois imaginée est sous mes yeux. Je passerai des heures à observer cette mer desséchée devenue source de richesse, obsédante dans son immensité. Il est étrange qu’elle ne lasse pas, comme si le regard s’accommodait de son étendue. C’est sans doute la surprise d’y découvrir des traits qui brisent sa monotonie : elle n’est point unie comme un pré qui n’aurait pas de bornes, mais mamelonnée ou vallonnée, et couverte d’une herbe drue. Elle est nuancée, de jaune, de vert et de bleu. Des bosquets, plus qu’on ne croirait, entourent des fermes imposantes, flanquées de larges granges, comme en Normandie ou au Poitou. Ailleurs, des maisons basses, seules ou parfois rapprochées, dans ce qui semble un silence total. Des collines barrent l’horizon. On aperçoit des lacs que survolent des oiseaux blancs.

La terre, vue de la tranchée du chemin de fer, est épaisse et noire, criblée de cailloux. On la sent généreuse, quoiqu’elle laisse, à ce moment de l’année, une impression de repos et d’attente. Encore quelques semaines et elle connaîtra le froissement moiré des blés fauves au souffle hâtif de l’automne.

Le soir, un soleil rapide s’enfonce à la limite de la plaine ; et le ciel se referme, aussitôt gris…

***

Hourticq et Jaray dans leur livre : De Québec à Vancouver, caractérisent les villes du Canada par leurs hôtelleries ; elles évoquent le long de leur route des châteaux d’une Renaissance enfantine, des redoutes, des élévateurs, des pics. Sans doute, mais leurs Parlements et leurs Hôtels de ville, où l’on sent une volonté de puissance, nous retiennent.