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SOUVENIRS

vrit… Voici que les hommes et les jeunes gens s assemblèrent en groupes sur le large perron, et les salutations joviales, les appels moqueurs lancés d’un groupe à l’autre, l’entre-croisement constant des propos sérieux ou gais, témoignèrent de suite que ces hommes appartenaient à une race pétrie d’invincible allégresse et que rien ne peut empêcher de rire. » C’est une manifestation d’âme collective empreinte de bonhomie, de vivacité, de gaillardise. Là, penseras-tu, nous sommes totalement nous-mêmes, français d’attitude et d’instinct.

Si tu résides un peu de temps dans le village, tu le connaîtras mieux, hommes et choses.

Remarque comment, dans notre province française, le village se déroule en longueur au bord de la route, comme un chapelet dont l’église marque la croix. Nos pères, mus par l’esprit communautaire, par le souci de se défendre contre l’Indien, et de se ménager une voie de communication possible qui fut longtemps le cours d’eau, installèrent leurs maisons au bord du chemin laissant libres les hauteurs de leurs terres. Ils étaient hospitaliers et cultivaient le voisinage. La voirie, sitôt qu’elle prit force, consacra cette habitude, fortifiant les bourgades, ou tentant de les fortifier sur l’ordre du roi.

Lorsque le paysan quitta le fleuve pour s’enfoncer dans les terres, il obéit à la même impulsion : les montées, comme on les appelle, sont, ici et là, bordées d’habitations, de même que les rivières. Les exceptions sont rares. Tu rencontreras parfois de grands villages où le rang des maisons se double, où se forment même des sortes de banlieues : simples poussées du peuplement. La règle, c’est la paroisse et le rang enlignés.

Tu reconnaîtras le même phénomène en dehors