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DÉLÉGUÉ UNIVERSITAIRE

demeure ; dont le souvenir revit quand on évoque les coins du monde où l’esprit s’est apaisé dans une harmonie. Les traditions y logent comme le printemps dans un pays sauvage. La religion, la loi, le régime judiciaire, lui sont propres. Pourtant, l’Ecosse est liée à l’Angleterre. L’en détacher enlèverait à la terre britannique un de ses charmes, peut-être le plus prenant. L’exemple de l’Ecosse montre que l’unité n’est pas dans l’assimilation, comme on le pense trop chez nous, mais dans les œuvres nées de la confiance et de la liberté.

Le dîner se poursuit dans une gaieté sobre. Je suis à côté du City Treasurer qui exerce son humour sur ses concitoyens comme fait tout bon Écossais, fût-ce à propos de certains défauts qu’on leur prête à tort. — « Voyez votre voisin, me dit-il, il a empoché la carte sur laquelle on avait inscrit son nom — he pocketed his name ! » Ce monsieur qui est en face de vous, poursuit-il, est l’homme le plus distrait d’Écosse. Voyageant par chemin de fer entre Édimbourg et Londres, il envoya à sa femme une dépêche désespérée : — « Mary, where am I going to  ? » À quoi Mary imperturbable répondit : — « Look on your ticket. John. »

En descendant après le dîner le grand escalier d’honneur, nous entendons le bruit des couverts que l’on rassemble en hâte : — « See, me dit le Trésorier à l’oreille, they are counting the spoons. » Cela me rappelle une histoire que je tiens d’un Écossais. Trois hommes — un Anglais, un Irlandais et un Écossais — discutaient courses. La course la plus serrée que j’ai vue, dit l’Anglais, est une course entre deux bateaux. Le premier l’emporta à cause de la double couche de peinture dont il était revêtu. J’ai vu mieux que cela, dit l’Irlan-