Page:Montreuil - Les Rêves morts, 1927 (deuxième édition).djvu/48

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Que des parents en pleurs, et sans doute une mère, Des
frères, une sœur et des amis en deuil,
Sont venus confier ce trésor à la terre,
Arbres silencieux, n’avez-vous pas pleuré ?
Lorsqu’on a sur ton pied posé la tombe blanche,
Trone rugueux, qu’en passant, elle avait effleuré,
N’as-tu pas tressailli ?… Vieux chêne, dont la
[branche

Au-dessus de ce tertre à jamais délaissé,
Comme un voile étendu, mélancolique penche
Et donne sa fraîcheur au doux rêve passé,
Veux-tu me raconter ce que tu sais de l’ange
Qui sommeille, depuis bientôt quatre-vingts ans ?
Le chêne a répondu : "Je sais qu’elle était belle,
Et combien on l’aimait. Hélas ! depuis longtemps,
Nul ne la connaît plus, mais je me souviens d’elle ;
Son âme auprès de moi revient encore errer
Je suis l’unique ami de la morte oubliée Et
quand la forêt dort, je l’entends soupirer ; Dans
la brise, sa voix en un souffle est muée :
"Parents qui m’adoriez, dont j’ai senti les pleurs
Mouiller mon blane linceul, mes coussins de dentelle,
Et mon lit de parade, orné de mille fleurs,
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