Page:Montreuil - Les Rêves morts, 1927 (deuxième édition).djvu/49

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Qu’êtes-vous devenus ?… « » En vain"… mur[mure-t-elle,
"Pour

sauver de l’oubli l’être qui vous fut cher,
Vous avez dans le marbre enchassé sa dépouille !…
Mais le Temps vous défie ; en ce qui fut ma chair,
Au fond de ce tombeau, lentement sa main fouille…
Vers ce tertre isolé, qui n’a plus de chemin,
Nul ne vient pour prier ; si, parfois, quelqu’un passe,
Brisant, en se hâtant, un rameau de sapin,
Il détourne, inquiet, d’ici sa marche lasse…
Ah ! le marbre a duré plus que le souvenir !
J’ai vu, depuis longtemps, sur les tombes voisines,
L’herbe étouffer les fleurs, les noms s’évanouir,
Et seul, ici, mon corps a nourri des racines…
Les autres sont partis pour d’autres champs de morts,
Où l’orgueil à leurs os a mis un frais suaire…
Mais, le repos m’est doux plus que ces vains
[dehors !…

Et l’oubli m’est un bien, dans ce lieu solitaire,
Qu’avait choisi pour moi le plus grand des amours,
Car, ici, je revis, je revis, joie extrême !
Dans la plante qui germe et qui eroît tous les jours :
Ma jeunesse renaît, en l’asile suprême !
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