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Page:Moréas - Iphigénie, 1910.djvu/100

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Laisse sa maison vide, et l’autre, indifférent
Aux cris de ses enfants, de son épouse en larmes,
N’aspire dans son cœur qu’au nom de conquérant.
Mais du repos des vents notre flotte captive
Abuse cette ardeur, la retenant oisive ;
Et moi-même abusé, les plus sacrés liens
N’ont point su m’arrêter aux champs thessaliens.
Quoi ! j’ai quitté mon père appesanti par l’âge
Pour vivre sans honneur sur un âpre rivage !
Mes fidèles guerriers, qui murmuraient tout bas,
De se plaindre tout haut ne se contiennent pas.
« Achille, disent-ils, est-ce Eurus ou Borée
Qui s’apprête à souffler par le détroit d’Eubée ?
Attendrons-nous toujours ces butins, ces lauriers,
Qui nous ont fait te suivre et quitter nos foyers ?
De nous tirer d’Aulis en vain tu t’évertues :
Puisqu’il te faut encore ici demeurer coi,
Que ne retournons-nous plutôt à nos charrues,
En laissant ceux d’Argos aux lenteurs de leur roi ? »