Page:Moréas - Iphigénie, 1910.djvu/119

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Suis-je toujours livrée au pouvoir des malheurs ?
Le fils de la déesse est touché de ma plainte :
balancerai-je encore entre l’aise et la crainte ?
Quoi ! Lorsque ce héros me répond du destin,
je ne fixerais point mon esprit incertain ?
Ah ! Comment te louer, ô magnanime Achille ?
Ce sera d’une ardeur ou trop forte ou débile ;
car de pareils excès mon cœur est combattu :
j’adore ta pudeur autant que ta vertu.
Une âme, je le sais, hautement vertueuse,
ne souffre qu’à regret la langue trop flatteuse.
Je me verrai pourtant mettre au rang des ingrats,
si pour un tel bienfait je ne t’exalte pas !
Je me lamente, hélas ! J’étale des misères,
Achille, et j’en rougis, qui te sont étrangères ;
mais le don généreux a toujours double prix,
quand sans nous abaisser nous en sommes surpris,
et c’est comme tu fais qu’un noble cœur soulage
un mal injurieux qui n’est pas son partage.
Oui, ne te lasse point de nous prendre en pitié :