Page:Moréas - Iphigénie, 1910.djvu/141

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vas-tu, de tes exploits effaçant la mémoire,
laisser parmi les Grecs un sinistre renom ?
Parce que Ménélas, ennemi de sa gloire,
de son lâche désir sans cesse consumé,
souhaite encore Hélène en son lit diffamé,
répandras-tu ton sang ? Te rendrais-tu coupable
d’un forfait sans exemple et le plus détestable ?
Quoi ! Si la fausse Hélène a suivi son amant,
faut-il qu’Iphigénie expire en ce moment ?
Te l’avais-je enfantée, hélas, est-elle née
pour être la rançon de cette forcenée ?
Je te le dis, prends garde, Agamemnon, et crains
de changer dans mon cœur en haine mes chagrins.
Aveugle criminel, si le dieu des batailles,
Arès, n’accorde point de forcer les murailles
de l’antique Pergame, ou qu’un retour amer
te fasse errer longtemps sur la profonde mer,
quels vœux formeras-tu ? Quelle prière vaine
sortira de ma bouche ? Ah ! Les dieux immortels
voudront-ils t’épargner et détourner leur haine