siécles, qui sont rassemblés quelquefois dans une même page, doivent du moins être distingués les uns des autres par des épooques fixes : ordre auquel Moréri & ses continuateurs se sont rarement assujetis. Quelquefois ils débitent les faits les plus irnportans, sans les accompagner d’aucune date : Presque par-tout, même dans l’histoire sacrée & dans l’histoire grecque, la plus proche des temps fabuleux, ils n’emploient point d’autre époque que celle de la fondation de Rome ; ce qui ne paroit pas moins irrégulier, que s’ils se servoient de l’hégire dans l’histoire de France. Quant aux années du monde, ils n’embrassent point de supputation uniforme. Quoiqu’ils s’attachent ordinairement à celle de Torniel & de Salian, ils ne laissent pas en d’autres ocsasions de suivre indifféremment Scaliger, le P. Petau, Riccioli, & même les chronologistes les plus opposés entr’eux, tels que sont ceux qui comptent suivant la version des Septante, & ceux qui s’en tiennent au calcul de la Vulgate. Outre que ce mélange de chronologies différentes répand une difformité visible dans tout le corps de l’ouvrage, il y jette encore une confusion qu’il est presque impossible de débrouiller. Car comme il y a peu d’histoires dont il ne soit fait mention plus d’une fois dans le Dictionnaire, par rapport aux différens noms des acteurs qui y ont eu part, souvent la même action dans ces différens articles, y est rangée sous différentes dates, parceque les extraits ont été empruntés de divers auteurs, dont chacun supputoit à sa maniere.
Pour remédier à ce désordre, j’ai jugé qu’il seroit bon de réduire l’histoire sacrée & l’histoire ancienne sous les loix d’une même chronologie, des plus approuvée : telle paroit être aujourd’hui celle d’Usserius, dont les annales ne s’étendent que jusqu’au commencement de l’empire de Vespasien. A l’égard des siécles qui ont suivi la naissance de Jésus-Christ, j’ai observé dans la distribution de leurs années l’ordre qu’a gardé M. de Tillemont dans ses ouvrages historiques ; & depuis le point où ces mémoires nous manquent, jusqu’à notre temps, c’est sur l’Abrégé chronologique du P. Labbe que j’ai cru devoir me regler. Bien plus, pour suivre la maniere de compter la plus usitée, j’ai regardé l’ére chrétienne comme le centre où doivent être rappellées les autres époques. J’ai donc employé par tout cette ére, ou plutôt l’ére que nous appellons vulgaire ; mais j’ai cru devoir lier ce calcul universel, avec celui qui convenoit le plus aux peuples & aux empires, dont j’étois obligé de rapporter quelques traits d’histoire. Sur ce plan, chaque événement de l’histoire sacrée, de l’histoire des premiers empires, & même de l’histoire grecque, jusqu’à la premiere olympiade, sera rangé sous certaine année du monde, réduite à l’ére de Jésus-Christ. Ainsi Abraham mourut l’an du monde 2183, & 1821 avant J.C. Am-Essis, sœur d’Aménophis, commença de regner en Égypte l’an du monde 2239, & avant l’ére chrétienne 1765. Acrise, roi d’Argos, succéda à son frere Boëtius vers l’an 2661 du monde, & avant l’ére chrétienne 1343. Quoique ce dernier article dépende de l’histoire grecque, je m’y sers encore des années du monde ; mais depuis l’institution des olympiades, c’est par elles seules que je compte dans l’histoire grecque, sans pourtant omettre l’ére chrétienne. Par exemple, Abydos ville d’Asie, sur le détroit du Bosphore ou de Constantinople, fut prise par Philippe, roi de Macédoine, la premiere année de la CXLV olympiade, 200 ans avant J.C. Dans l’histoire romaine, j’ai recours à l’époque de la fondation de Rome, & aux consulats. Accius, Actius ou Attius, poëte latin, naquit sous le consulat d’Hostilius Mancinus, & d’Attilius Serranus, l’an de Rome 583 & avant l’ére chrétienne 171. Depuis Jésus-Christ, je suppute simplement par les années de l’ére chrétienne. Abgar, roi des Arabes, & souverain d’Edesse, vivoit sous l’empire de Trajan, lorrque ce prince soumit l’Arménie, l’an 107 de l’ére chrétienne. Abgar, roi d’Edesse, vivoit sous l’empire d’Antonin le pieux, vers l’an de J.C. 138. Comme j’ai cru, dans un ouvrage tel que celui-ci, ne devoit pas citer la Période Julienne, qui semble n’être faite que pour les savans, je me suis aussi dispensé d’employer les éres particulieres de quelques princes & de quelques peuples, telles que celles de Nabonassar, des Seleucides, de Dioclétien, &c. Il n’en est pas de même de l’ére de Mahomet, appellée l’hégire : je m’en suis toujours servi dans l’histoire de ses sectateurs, parceque leurs historiens l’ont employée par-tout ; mais je l’ai toujours unie à l’ére chrétienne, suivant la réduction qu’en a fait Gravius. Aaron, cinquiéme calife de la maison des Abbassides, appellé par nos historiens Aaron, roi de Perse, vivoit du temps de Charlemagne, & mourut l’an de l’hégire 193, & de l’ére chrétienne 808. Voila les changemens qui m’ont paru nécessaires dans la chronologie.
II. La Géographie n’étoit guères mieux traitée. La plupart des articles qui regardent l’ancienne géographie, avoient été puisés, non dans les premieres sources, mais dans des auteurs modernes, qui souvent n’ont pas eux-mêmes consulté les originaux : ce qui paroît visiblement par les bévues dont on charge les anciens auteurs, par l’infidélité des citations, & par l’obscurité qui confond l’histoire des villes de même nom, quoique ces villes soient exactement distinguées par Strabon, & par les autres anciens. Je ne chargerai point ce projet d’un nombre d’exemples inutiles, & je me contenterai de ceux qui