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— En êtes-vous sûr ? fis-je malgré moi.

— Pourquoi ? demanda-t-il en me scrutant…

— Parce que, répondis-je… Moi aussi je suis allée à ce Bar… Ce matin…

— Ah ! fit-il… Vous auriez dû me prévenir auparavant.

— Vous savez bien que nous devons travailler chacun de notre côté… C’est vous-même…

— Oui, oui, sans doute… Cependant… et il hocha la tête sans finir sa phrase… Et que vous ont-ils raconté ? À vous ?

— Oh pas grand’chose d’intéressant… Mais du moins cela m’a permis de rédiger mon premier article avec quelques rudiments d’enquête…

— Quand paraîtra-t-il ?

— À l’heure actuelle, la première édition doit déjà être mise en vente…

— Selon vous, vous pensez qu’il peut y avoir une piste possible de ce côté… reprit Delbarre en revenant à la conversation…

Je baissai la tête affirmativement.

— J’ai l’impression qu’Antonio et sa bande, comme vous dites, doivent en savoir plus long qu’on ne pense sur l’affaire… Au fait, continuai-je, vous étiez sans doute venu pour m’interroger… Peut-être désiriez-vous faire chez moi une perquisition plus approfondie ?

— Inutile ! D’avance, je suis certain de ne rien trouver d’autre que ce que j’ai déjà découvert… Non, je voulais surtout entendre les dépositions des autres locataires… Peut-être auront-ils quelque chose d’intéressant à nous dire ?

— C’est juste ! Je n’y avais pas songé…

Il eut un sourire un peu ironique.

— À chacun son métier, Mademoiselle… Et si cette enquête est susceptible de vous fournir matière à votre prochain article, je ne verrai aucun inconvénient à ce que nous la fassions ensemble…

J’acceptai son offre avec une joie sincère…


CHAPITRE III

La première personne que nous allâmes voir, fut la concierge. Comme à l’habitude, un écriteau : « La concierge revient de suite » était suspendu à la porte de sa loge, mettant bien en évidence la grossière et incorrigible faute de français de cette phrase courante…

Par chance, à l’instant où nous nous apprêtions à nous éloigner, elle arriva, son cabas au bras.

Ses déclarations se résumèrent en fort peu de chose : elle dormait, n’avait rien vu, rien entendu, ne m’avait vue ni partir, ni rentrer et l’arrivée même de la police n’avait pu la tirer de ses rêves. Nous perdions notre temps avec elle…

Les deux locataires du premier étage ne purent, eux non plus, nous donner le moindre renseignement.

Ce ne fut qu’au quatrième, à l’étage en-dessous du mien, mais