Page:Morelles - Les diamants de Kruger, 1906.djvu/24

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 24 —

qui allaient s’embarquer à bord du « Stanley » pour reconduire le contingent jusqu’à Rimouski. Un des ministres, se penchant hors de la portière, demanda à un homme aux cheveux gris bouclés qui arrivait, le feutre mou sur le coin de la tête :

— Eh ! bien, mon vieux Dubut, quelles nouvelles au « Soleil ? »

— Mauvaises, depuis tantôt.

— Mauvaises ?

— Mauvaises, oui. Dame, ça dépend. Moi je les trouve bonnes, mais vous… ?

Un camelot aux cheveux longs, les deux bras chargés de journaux frais, murmura à l’oreille du journaliste :

— Très mauvaises, mais il ne faut pas le dire, ça va décourager ces soldats-là.

— Comment ça ?

— Les Anglais se sont fait tuer, prendre ou blesser deux mille hommes à Ladysmith.

Il n’avait pu parler si bas qu’on ne l’entendît.

Dolbret l’interrogea :

— Vous dites ?

— Deux mille Anglais prisonniers ou tués dit, à voix haute cette fois, le camelot.

La nouvelle fit traînée de poudre. Un mendiant la cria à tue-tête :

Deux mille-z-Anglais de tués à Ladysmith !

Tout près de Dolbret, en avant, en arrière, à ses côtés, des voix murmuraient tout bas :

« Hold him well, he is getting tired. »

Morot ne tenait plus le bras de son ami ; celui-ci s’aperçut soudain que quelqu’un, tout de même, était à son bras droit. Et il avait toujours l’étranger à sa gauche. Qu’on ne s’étonne pas trop